Quelle coïncidence troublante entre l’actualité politique et ma petite actualité éditoriale.Je m’explique.La Lieutenance Générale du Royaume, lasse de voir son chaton pompidolien échouer lamentablement à attrapper les souris que le jeune rat national a déjà rassemblé à hauteur de trente pour cent, s’est trouvée une nouvelle cible de vindicte giboyeuse aux circonstances aggravantes; le lapin. Or, le souci étant grand en haut lieu de froisser le moins possible les défenseurs de la cause animale et autres adeptes de singeries véganes, il s’avérait nécessaire de trouver une alternative à une saint Barthélemy des terriers. Ils ont fait fort. On ne dézingue plus, on taxe! Et pour un motif hautement justifié preuve d’un non sens civique trop récurrent. Le peuple de la garenne a trop tendance à ne pas honorer les rendez-vous qu’il a pris auprès des instances médicales. Si fait, les tronches de Bercy qui ne sont pas foutues de boucler un budget dans les clous se sont révélés experts comptables en calculs de lapins posés par des lapins poseurs. Vingt sept millions qu’ils sont, que nous sommes devrais je dire. Vingt sept millions à poser des lapins aux bons thérapeutes alors qu’ils avaient mis entre trois et six mois à obtenir un rendez- vous pour se faire inspecter le râble, le poil de bourre ou un certificat de complaisance pour éviter le vaccin contre la myxomatose. Dorénavant il nous en coûtera cinq boules par lapin posé ! C’est peu cher payé pour si peu de civisme et de respect face à des professionnels débordés et hautement qualifiés d’autant plus que les salles d’attente, qui comme leur nom l’indique sont des endroits où l’on attend quelquefois des heures, sont chauffées et décorées et on peut y lire la presse Bolloré sans rien louper de l’actualité des amours des têtes couronnées.Cinq boules c’est peu mais multiplié par vingt sept millions ça fait un sacré paquet de trèfles mes lapins! Cela dit rapporté aux vingt milliards que Nono les bons tuyaux doit trouver pour boucler son budget c’est queues de cerises et fanes de carottes. La taxe lapin que ça va s’appeler. Forcément on n’allait pas appeler ça la taxe dindons ou la taxe pigeon. Ah mes agneaux!Je devrais en frémir d’ effroi mais j’y trouve plutôt matière à me réjouir. il y a de quoi. Aujourd’hui est arrivé par transporteur mon nouvel album et c’est justement un ouvrage sur les lapins. Incroyable! J’y vois plus qu’un signe, j’y vois la marque du Zeitgeist, l’esprit du temps. Aussi me vois-je bien obligé de pratiquer une démarche équivalente en taxant à mon tour.La taxe ou la redevance pour acquérir ce superbe album illustré de râbles à la rotondité parfaite et aux couleurs chatoyantes entièrement réalisé à la main est de vingt deux pauvres euros et cinquante misérables cents. Ça n’est pas remboursé par aucun régime de santé, ça se saurait et un peu que le cœur m’en fend rien qu’à l’idée de creuser encore plus profond le fameux trou des dépenses sociales. Il n’est pas nécessaire de prendre rendez-vous pour se le procurer car on peut venir en consultation à toute heure au cabinet de travail dont l’adresse est indiquée comme à l’accoutumée en bas de page et je suis toujours heureux d’offrir un excellent café le temps de la dédicace. ou de l’échange. On pourrait se donner rendez-vous lors des futures manifestations liées au livre mais je préfère vous dire que ça commence demain. Je vous ferai le coup classique du grand cerf dans la forêt qui regarde par la fenêtre quand vous viendrez frapper à l’huis, puis entrerez pour venir me serrer la main tout plein de gratitude à l’idée de votre si généreuse contribution à l’équilibre de mon budget si difficile à maintenir surtout les vingt sept derniers jours du mois. Vingt sept encore. Trois fois neuf. Le chiffre fatidique. Que du bonheur !