Coup de balai à Legoland et chez Ikea

Tout affairés que nous étions à nous agiter le 9 juin au soir autour de notre pauvre corps électoral en pleine dissolution dans une vieille baignoire cinquième République remplie d’un liquide élyséen un rien trouble, on en aurait presque oublié de regarder d’un peu plus près le bilan de l’élection européenne d’il ya quinze jours. L’essentiel  de l’analyse fournie par nos éditorialistes nationaux unanimes se résumait à une redoutable percée générale de l’extrême droite partout en Europe. Partout? Pas si vite. Bon d’accord, là on a le renouvellement d’une assemblée nationale qui vient de pointer le bout de son nez avec certainement un nouveau gouvernement dont personne pour l’instant sauf en fantasme peut annoncer la couleur. Alors il vaut mieux installer une sainte pétoche afin de mettre un peu de piment dans la soupe qu’on nous sert jusqu’ à dimanche soir, non?De rares professionnels de l’information se sont fait écho en y mettant un bémol de cette omniprésence de la grippe brune dans les urnes des pays de la communauté européenne. Partout avez vous dit( au risque de me répéter) ? oui oui . Et bien non ! L’extrême droite a été tenue en échec retentissant par les écologistes et la gauche radicale dans les trois pays scandinaves siégeant au parlement européen !  On ne s’intéressera  pas à la Norvège qui avec un PIB d’avance alors que nous ramons avec un de retard  n’en a rien à péter de l’Europe et de ses  problèmes. Pas plus qu’ à l’Islande qui ne siège pas à Bruxelles et qui de toute façon avec une population avoisinant celle du Luxembourg ne pèserait pas bien lourd dans la balance mais à qui nous rendrons un hommage  sincère en tant que pays où le nombre de livres lus par habitant caracole en tête. Certes ça n’a pas grand chose à voir avec le sujet , mais quand même, respect.Les démocrates de Suède qui ont un accord de coalition à la ligne très dure se retrouvent en quatrième position derrière les écologistes et même punition pour leurs camarades finlandais et danois. Il est important de préciser que jamais depuis 1988 l’extrême droite de ces trois pays n’avait reculé lors d’une élection.Vous avez bien lu.  Encore plus intéressant est l’information selon laquelle l’immigartion a été le sujet le moins porteur de la campagne avec une relégation à la onzième place . L’écologie et l’état de droit occupant les premières. Pause. Je sais, j’entends comme vous quotidiennement les fifres et les roulements de tambours annonçant la défaite comme autant de chamades inévitables. Je les prends très au sérieux. Vraiment. En tant que lecteur assidu de Günther Anders, je sais que le danger vient beaucoup du manque d’imagination face à l’ horreur qui s’annonce. L’imagination,  les élus nordiques en ont cruellement manqué qui se voyaient surfer une vague monstre et qui se sont retrouvés à faire des châteaux de sable sur la plage. J’entends aussi mes contempteurs, qui seraient tentés, à juste  titre d’ailleurs, de m’inviter à aller tâter de cette herbe là puisqu’elle me semble d’un vert si attirant.Mais  le piètre jardinier amateur que je suis sait  bien que l’important n’est pas de trouver le gazon du voisin plus vert ou son jardin plus éclatant mais juste de s’informer; ” tu fais comment pour supprimer les mauvaises herbes? “

Sale temps pour les souris

Il pleut. Encore. Toujours. C’est devenu d’une telle banalité qu’on en est à se demander si on ne serait pas en train de devenir anglais et surtout si quelque autorité supérieure pouvait arrêter d’écouter Bobby Lapointe en boucle et surtout nous faire grâce d’une petite prévision optimiste.Bien malin qui pourrait, aujourd’hui, prédire avec certitude la météo du 7 juillet au soir. Bleu marine ou rose populaire? Les sondeurs de tous bords et poils en sont quitte pour donner leur langue au chat. Qu’on lui donne une langue, qu’on lui en donne  dix ou cent,  le chat s’en bat les moustaches. Ce qui l’intéresse c’est qu’on lui apporte des voix. Le plus possible de voix.  Comme autant de petites souris qui se laisseraient  appâter par l’odeur alléchante d’un fromage à 33% Heil et fines herbes.Le chat dont on sait bien grâce à la sagesse asiatique que sa couleur importe peu, n’a que faire d’une langue autre que la sienne qu’il maîtrise d’autant plus parfaitement qu’elle est de la  même matière que la fameuse trompette de Georges Milton qui n’en jouait pas pour la bonne raison qu’elle était en bois. Un bon vieux bois de derrière les fagots ayant séjourné si longtemps dans le marigot des différents appareils qu’il en est vermoulu. Aussi tient-il de la planche pourrie genre radeau de la méduse pour les pauvres et naïves souris naufragées toutes ignorantes du  triste sort que leur réserve les félins félons rôdant en embuscade à l’approche des bureaux de vote. Dans une petite dizaine de jours elles pourront voir se profiler les silhouettes des différents matous occupés au moment présent à trouver le meilleur plan pour aller s’installer dans les caves du magnifique hôtel au cinquante sept rue de Varenne. Le locataire du cinquante cinq faubourg saint Honoré ne donnera son congé qu’en deux mille vingt sept.  Alors le mot d’ordre chez les souris c’est bien ; méfiance. D’un strict point de vue stratégique, des deux choses que la souris doit surveiller chez le matou, de  la moustache ou de la queue, les petits rongeurs de la famille des muridés savent que c’est de la queue dont il faut le plus se méfier car tout comme celle des cro-magnons priapiques qui sévissent avec tant d’impunité dans la race humaine que ce soit dans les médias  ou dans les arts, quand la petite souris la voit il est souvent trop tard.   

Grandeur et décadence du petit commerce de détail.

En 2002, à la grande surprise des habitants du quartier, l’épicerie Jospin déposait le bilan. Le père Lionel baissait le rideau, assommé par la concurrence agressive de la supérette Le Pen quelques rues plus loin. Des deux repreneurs potentiels du fond de commerce Jean-Luc et François, il choisit le second. Force est d’admettre que le premier en ait conçu quelque déception et ressentiment.  Aussi s’en est il allé un peu plus loin dans la rue ouvrir son propre bouclard où les clients déçus du changement de propriétaire pourraient venir faire leurs courses avec une large gamme de produits certifiés en rupture de stock chez Lionel. Bon an mal an le commerce ne se portait pas trop mal même en changeant d’appellation, mais la concurrence était rude et le chiffre d’affaires de la supérette du père Jean-Marie avait sacrément gonflé depuis que la fille l’avait reprise en main  pour en faire un hypermarché bien ripoliné aux couleurs du temps où, aux dernières nouvelles,  pas loin de la moitié du quartier se presse pour y faire ses courses. Certes, il y aurait bien une louable tentative d’union des petits commerces du quartier pour contrer cette hégémonie menaçante à l’extrême mais le père Jean Luc a du mal à gérer son fonds de commerce face à un personnel et une force de vente un brin récalcitrants qui mettent  en cause sa gestion un rien paternaliste et autoritaire. Le sept juillet au soir on saura avec plus de précision ce qu’il va en advenir du commerce de gros et de détail dans le quartier mais c’est loin d’être gagné pour la petite épicerie populaire face à l’hyper au patronyme rassembleur. Faut dire que la nouvelle direction, son tout jeune et nouveau responsable de la stratégie et des ressources humaines aidant,  a su ratisser large sur l’offre en spéculant avec une certaine réussite sur la demande alors que dans le même groupe, la famille de proximité pourrait-on dire, on se cantonnait dans un effet canada dry; ça y ressemble, ça en a le goût et la couleur mais ce n’est pas la recette originale…Pour moi aucune hésitation, il est hors de question que je fasse mes courses dans un Hyper je préfèrerai toujours l’épicerie populaire mais si ça pouvait changer de direction ça faciliterait grandement les choses.

De quoi j’ai LR

Si comme le prétendait Louis Jouvet le plus difficile dans ce métier serait de trouver un siège il est fort probable que le plus dangereux c’est  bien d’être prêt à tout pour le conserver.Cette dissolution, ainsi que le dissolveur l’a précisé à juste titre dimanche soir, aura  au moins le mérite de clarifier la situation chez les différents acteurs autant que dans la mise en scène…et, malheureusement, ça ne fait que commencer aussi les plateformes de fictions vont  elles avoir une baisse de fréquentation car le feuilleton  en direct à des rebondissements quotidiens sacrément inattendus.

Ripopées au village

Le village où je vis mérite bien son nom. Il est vraiment tranquille. Sur la place de la mairie les trente huit panneaux sensés  être recouverts des promesses électorales de toutes les tendances qui vont s’affronter dans les urnes dimanche sont ,pour plus de la moitié d’entre eux, désespérément vides. L’autre moitié affiche, pour un bon nombre, ni plus ni moins que la proposition de sortir d’une union pour laquelle il leur est demandé de choisir des représentants et qui restent vierges de tout graffiti moqueur. Où va t on je vous le demande si même les sales gosses, dont je confesse avoir fait partie il y a fort longtemps, n’ont même plus le cœur à maculer les portraits des candidats divers du petit carré de moustache et de la mèche si tristement reconnaissables … L’électeur aurait-il perdu le goût et l’appétit de se moquer de la chose publique? Que nenni, sa gourmandise le porte vers d’autres évènements tout simplement. J’en prends pour témoin la joyeuse manifestation conviviale aux accents gastronomiques qui se tiendra ce vendredi au centre de mon village et qui même en cas de météo peu clémente verra comme chaque année  l’ensemble des citoyens venir s’y restaurer dans la joie et la rencontre.Un marché gourmand, c’est l’appellation exacte. La digestion étant un processus incontrôlable on peut risquer de penser qu’elle  ne permettra pas à la plupart de ces convives d’emprunter le même chemin environ trente six heures plus tard afin de venir exercer leur droit de vote à quelques mètres de l’endroit même où ils festoyèrent et trinquèrent grandement si l’on en croit les ripopées  qui ça et là traîneront  sur les différentes dessertes et qui n’auront rien à envier aux autres , les littéraires qui resteront sur les tables du bureau de vote une fois venue l’heure du dépouillement  faute d’avoir trouvé le chemin jusqu’à l’urne.Je m’abstiendrai de l’un de ces deux marchés mes préférences allant à l’urne plutôt qu’à la gourmandise. Une abstention vaut bien l’autre. Je pense dîner tôt et frugal, certainement un brin fatigué d’avoir passé la journée à dédicacer avec quelques collègues nos ouvrages dessinés place Kléber à Strasbourg dans le cadre du festival  “Entendez-voir” qui nous accueille généreusement sur son site. Nous y serons également samedi ainsi que dimanche. Cette joyeuse et conviviale manifestation  culturelle commençant à dix heures nous  aurons juste le temps d’aller déposer le bulletin dans l’urne à l’ouverture du bureau de vote avant d’aller nous faire voir à “Entendez voir”. Voter c’est comme le viandox, le foot ou encore  les horreurs de Jeff Koons qui défigurent l’espace public, c’est pas parce qu’on n’aime pas qu’il faut en dégoûter les autres. Certes on peut aussi aimer les trois mais c’est plus rare. Je dis ça , je dis rien .