Vial victime ordinaire du zèle ordinaire Publié le 7 février 2014 par Pat Victime ordinaire du zèle ordinaire. Nicolas Vial a déssiné pour le journal “Le Monde” pendant trente deux années et vient d’en être viré. Cela ne semble pas s’être fait avec la plus grande des délicatesses aussi en appelle-t-il aux prudhommes. On espère qu’il va gagner. D’abord parce que virer un collaborateur de trente-deux ans ne se fait pas sans prendre quelques libertés avec le code du travail même quand il est artistique : le travail, pas le code. Ensuite parce que le trio d’affairistes qui dirigent le journal dans lequel il dessinait a vraiment beaucoup de pognon ! Ils viennent de se payer “Le Nouvel Observateur” et “Rue 89”, qui rajoutés à ce qu’ils possédent déjà, font une belle représentation du fameux “grand pôle de presse social démocrate” que l’ex-patron du nouvel obs aimait à évoquer en pensant au chèque de près de quarante millions d’euros. Cette puissance de feu explique certainement la relative discrétion éditoriale dans laquelle s’est déroulée l’éviction de Nicolas Vial et laisse planer bien des doutes quant à la possibilté d’exercer son talent comme dessinateur de presse dans un avenir proche. Je ne connais pas personnellement Vial. Je connais son travail et je sais qu’il ne manque pas de talent, tant sa palette est riche et variée et ses ressources diverses. Il jouit même du très honorable titre de peintre offiiciel de la Marine Française, institution prestigieuse dont la vocation n’est pas vraiment à introniser des agitateurs publics. Alors quid de l’embrouille? Le site sur lequel un mien contact a eu la delicatesse de m’orienter et qui n’est pas dans le giron du triumvirat BNP (pour Bergé, Niel, Pigasse) laisse entendre que le dessinateur aurait eu quelques délicatesses graphiques peu au goût de l’actuel locataire de l’Elysée. On croit rêver. C’est à croire que le service de presse de l’Elysée ne lit ni “Charlie” (hebdo), ni “Siné” ni “Fakir” j’en passe et des aussi bons….(comme “La Décroissance” évoquée hier dans ces colonnes ou “Article 11” ou “CQFD”). Pour moi, le scénario est d’une autre teneur et bien plus grave. Il n’est pas nécessaire d’être un lecteur avisé d’Anna Harendt pour pouvoir s’en inspirer et comprendre le concept qui a eu raison de trente deux ans d’activité artistique dans une entreprise. C’est celui de la banalité du zèle. La consécration des petits chefs, des sans-grades , des obscurs, des zélés dans l’art de prévenir les désagréments de leurs maîtres. Hollande et le trio BNP n’ont pas eu besoin de demander la tête d’un dessinateur qui aurait eu la mauvaise idée de leur déplaire. Quelque part, un factieux zélé et prévenant a anticipé leur énervement et éxécuté le dessinateur sans état d’âme. On connaissait la méthode Rousselet virant Martin Veyron, dans une indifférence quasi générale de la profession, pour un bon (c’est mon avis) jeu de mots dans le strip matinal de son tract néo libéral avant l’heure. On a connu l’empressement de l’ancien réac (y a pas de coquille) chef Vall à anticiper la ire sarkozienne et virant Siné après une quasi vie passée dans le journal de feu Cavanna. Là on assiste en direct au déquillage inodore et incolore d’un dessinateur qui doit encore se demander d’où ça a pu surgir. Encore une fois je ne connais pas Vial, et ce que je connais de son travail, que j’apprécie, est loin à mon goût d’être dérangeant. Et je ne pense pas qu’il soit un habitué de la dix-septième chambre du tribunal de grande instance de Paris. Toute cette affaire dans son approche n’est pas surprenante au sein de ce truc insipide et sans saveur qu’est devenu l’ancien journal de référence du paysage politico-culturel français. Aucun risque que ça arrive au dessinateur mièvre qui sévit sur la une et dont le trait éditorial consensuel ferait passer les regrettés Bellus et Faizant pour des dessinateurs trash et gauchistes. D’ailleurs qu’en pense-t-il le dessinateur vedette du” Monde” de l’éviction de son petit camarade? Ce serait intéressant à savoir non ? Vial se console en se disant que finalement il lui reste son talent. Aussi viendrait-il à l’oublier que Degas serait là pour lui rafraîchir la mémoire en lui rappellant que si “il est facile d’avoir du talent à vingt ans, c’est plus difficile d’en avoir encore à cinquante”. Cinquante ans. L’âge qu’auront certainement quelques difficultés à atteindre les petits cons qui ont instrumentalisé son éviction. Oui certes. Mais si c’était un quarteron de vieux qui en était responsables ? Alors il faudra nous résoudre à l’adage blazacien qui veut que les rédacs-chefs comme toutes les courtisanes débutent en jeunes putes et font de vieilles bigottes. Je me demande ce que va penser de tout ça le rédac-chef de la seule revue à laquelle je collabore?